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Adieu à deux chorégraphes majeurs

Funeste été 2009. Deux des plus grandes figures des arts du spectacle tirent leur révérence. Le 30 juin dernier, Pina Bausch est partie brusquement à l’âge de 68 ans, tandis que Merce Cunnigham décédait le 27 juillet, alors qu’il venait de célébrer ses 90 ans. Tous deux ont été à l’origine d’une immense révolution, non seulement dans le milieu de la danse, mais aussi dans le monde du théâtre. À travers son regard tendre, la chorégraphe allemande de Wuppertal dépeignait l’être humain toujours vulnérable et torturé, en perpétuelle quête d’amour. Le chorégraphe new-yorkais, père de la danse postmoderne, a contribué au renouvellement de la pensée de la danse dans le monde. Il a définitivement changé notre regard sur le mouvement, l’espace et l’art.



Pina Bausch, figure de proue de la danse allemande, n’hésitait pas à réduire le mouvement à sa plus simple expression pour mieux « inventer un langage pour ce qui ne pourrait pas être exprimé d’une autre manière ». La chorégraphe travaillait non pas sur des pas bien définis, mais par rapport à l’anatomie du corps de chacun et aux possibilités qui lui sont données. Elle interrogeait ses danseurs pendant tout le processus de création et creusait la vie de chacun pour les faire danser. Ses thèmes de prédilection étaient des dénonciations en bonne et due forme sur les codes de la séduction, la solitude dans le couple et la relation hommes-femmes. C’était finalement une vision très pessimiste qui s’exprimait par de petits gestes anodins répétés sans cesse jusqu’à devenir insupportables ou par l’accumulation de danseurs sur scène.



Ses spectacles mêlaient la parole et le jeu d’acteur à la danse, c’est pourquoi Pina Baush a été très appréciée les gens de théâtre, peut-être avant ceux de la danse. On a parlé d’opéra, de ballet, puis de Tanztheater (danse-théâtre) vers 1975 pour qualifier son travail, qui deviendra sa marque de fabrique. Une autre marque de son style était la fluidité qu’elle développait sur le haut du corps, induisant de grands mouvements de bras et une souplesse du buste.

Dans Café Müller, elle a travaillé sur son passé de jeune fille dans le café de ses parents en Allemagne. Elle reste imperturbable par rapport à ce qui se passe autour d’elle. Cette pièce est devenue célèbre grâce entre autres à un extrait dans le film de Pedro Almodovar « Parle avec elle » en 2001.

 


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Si Pina Bausch était la représentante de la danse allemande expressionniste, Merce Cunningham était sans conteste le géant de la « post modern dance » américaine.

C’est avec Merce Cunnigham, un adepte de la danse « pure », qu’ont commencé à se poser les problèmes de la danse moderne. Rejetant la narration, faisant de ses chorégraphies des performances à la lisière des arts plastiques et utilisant l’improvisation pour mieux faire vivre le plateau, sa danse était une écriture dans l’espace, une musique visuelle dont chaque corps s’empare. Sa collaboration unique avec le compositeur avant-gardiste John Cage bouleversa les codes de la scène.

Outre ses spectacles plus écrits, il aimait à présenter des « Event », sorte de performance unique improvisée et largement inspirée par le lieu, le moment et l’atmosphère dans laquelle elle était créée. Pourquoi cette utilisation du hasard dans ces œuvres ? C’était un moyen de se surprendre soi-même, d’aller au-delà de son propre ego, de sortir de ses habitudes.



En 1948, il expérimentait des mouvements inconnus avec Untitled Solo. C’était une danse assez verticale plus de l’ordre de la figure que de l’énergie. L’intérêt créatif résidait dans le chemin qui menait d’une figure à l’autre. Véritable danse de l’intelligence demandant une grande disponibilité mentale, celle-ci permettait en outre au spectateur de voir ou d’entendre ce qu’il voulait.

Enfin, Merce Cunningham a été l’un des premiers chorégraphes à s’approprier l’usage de la caméra pour filmer la danse, non comme un témoin de travail, mais comme un objet visuel en soi.

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Anne-Sophie Brault-Hamia

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