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Lectures d’été

 Lectures d’été

Les températures grimpent, les enfants rangent les manuels scolaires et chacun commence à songer aux congés estivaux. Voilà venu le temps de faire le plein de lectures pour agrémenter les siestes au bord de l’eau ou dans la fraîcheur d’une maison de campagne pour ceux qui partent, les pauses à l’ombre des palmiers ou derrière les rideaux tirés pour ceux qui restent.

J’ai choisi pour ces beaux jours des récits lumineux qui vous emmèneront à Meknès dans le Maroc des années 70 ; à Ogliano, petit village d’un Sud imaginaire entre la Corse et la Sicile ; dans une villa surplombant la Riviera italienne ; à la terrasse d’un café napolitain et dans le Paris de la Nouvelle Vague.

• Regardez-nous danser (Le Pays des autres, 2) de Leïla Slimani

« Amine avait avancé, pas à pas, comme une tortue, une bête digne et travailleuse. Il avait avancé vers un but en apparence modeste – une maison, une femme, des enfants – et il n’avait pas compris que son but, une fois atteint, le transformerait. »

Les lecteurs du premier tome, Le Pays des autres retrouveront avec bonheur Amine, Mathilde, Aïcha, Selma et tous les autres dans un Maroc désormais indépendant, tiraillé entre la rigidité du pouvoir royal et l’aspiration à un monde plus moderne.

Amine a transformé les terres rocailleuses de ses débuts en une propriété prospère où Mathilde a même réussi à lui faire creuser une piscine ! Ils appartiennent maintenant à la bourgeoisie locale dont les anciens colons font mine de les considérer comme des pairs… Mais Amine n’est pas dupe et évolue dans une société à deux vitesses dont il craint les embardées.

Leila Slimani accorde une attention particulière à chaque membre de la famille et met à jour toutes les facettes d’un pays qui bouillonne sous le joug d’Hassan II. De Selim perdu dans les vapeurs d’encens à Essaouira à Aïcha, dévouée à la cause des femmes, nous accompagnons toute une famille dans les méandres de son parcours.

J’envie les chanceux qui vont pouvoir lire d’une traite les deux premiers volumes de cette fresque dont on attend la suite avec impatience !

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• Les Silences d’Ogliano de Elena Piacentini

« La coexistence entre ces modes de vie opposés, bien qu’émaillés d’escarmouches, tenait bon gré mal gré, grâce à deux principes fondamentaux. Le premier exigeait l’hospitalité. On devait protection à qui demandait asile, fût-il poursuivi par une armée de carabiniers. On ne refusait pas la nourriture et l’eau à qui frappait à sa porte, même en pleine nuit et aussi pauvre fût la table. Le second intimait de fermer les yeux et de se taire, quoiqu’on voie ou qu’on entende. Quand l’un de ces commandements était violé, le sang et les larmes coulaient. »

Elena Piacentini s’était jusque-là cantonnée au roman policier et son premier roman en littérature blanche est une véritable réussite. Elle emprunte à l’Antigone de Sophocle la pureté des sentiments et la noirceur des cœurs.

Libero ne sait rien de son père mais sent qu’il est au centre des secrets de ce village qui pourrait être en Sicile, en Corse ou en Sardaigne… Libero connaît l’Argentu mieux que personne, il arpente ses forêts, ses chemins et ses ravines flanqué de son chien, loin des rancœurs et des mensonges des hommes.

Mais un jour, il est rattrapé par son histoire, il part à la découverte de son être profond et ce qu’il découvre l’horrifie et le ravit. Dès lors, il ne pourra plus rebrousser chemin…

Ogliano raconte l’histoire de tous ces villages où s’affrontent depuis des lustres les puissants et ceux qu’ils dominent, où les clans règlent entre eux des questions d’honneur et de déshonneur, où règne l’omerta jusqu’au jour où Antigone se dresse et réclame justice.

L’écriture d’Elena Piacentini est tranchante et acérée comme les paysages arides et sauvages qu’elle décrit avec brio et qui nous laissent espérer d’autres récits aussi inspirés que celui-là.

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• Une famille moderne de Helga Flatland

« C’est un choix bien réfléchi. Nous ressentons tous deux un grand vide maintenant, nous avons puisé tout ce que nous pouvions l’un dans l’autre, et dans ce mariage, continue papa. Nous ne voyons plus d’avenir à notre couple. »

Que se passe-t-il dans une famille quand les parents divorcent à 70 ans ?

C’est une décision de couple qui sème le trouble au sein de la fratrie déstabilisée par le brouillage des repères… C’est à travers les yeux de Liv, Hakon et Ellen que Helga Flatland raconte ce tsunami familial en reprenant les mêmes événements suivant les points de vue tour à tour des deux filles et du fils.

La fille ainée plonge très vite dans la dépression qui menace son couple alors que la cadette, en prise avec son angoisse de ne pas être mère semble indifférente. Quant au petit dernier, il est beaucoup plus affecté qu’il ne l’aurait voulu…

Il est donc question de liens familiaux, et surtout du lien de la fratrie dans ce roman qui a le talent de montrer des personnalités vraies, sans fard, ce qui ne peut  qu’intéresser le plus grand nombre. Chaque regard permet en effet d’envisager la psychologie des différents membres de cette famille semblable à tant d’autres et nous invite à réfléchir sur les interactions et les relations entre les parents et leurs enfants devenus adultes.

L’analyse est fine et réaliste.

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• Le café suspendu de Amanda Sthers

« Lorsqu’on commande un café à Naples, on peut en régler un second indiqué sur l’ardoise du bar comme un café sospeso : un café suspendu, offert à qui entrera sans avoir les moyens d’en payer une tasse. »

Jacques Madelin a soixante-douze ans, il est caricaturiste. Il s’est installé à Naples par amour. L’amour est parti ; lui, est resté. Il vit au-dessus d’un bar, il observe les clients et les croque.

 Amanda Sthers nous livre sept récits rapportés par ce fin observateur qui n’hésite pas à participer aux vies des clients ordinaires du Nube dont les vies comportent des éléments tout à fait surprenants ! Il est question d’amour et d’amitié, de crocodile et d’infidélité, de médecine chinoise et de solidarité. Ce sont des tranches de vies qui se dissolvent dans les volutes des cafés suspendus. Vous serez séduits, attendris, amusés par Les figures anonymes qui prennent vie sous nos yeux et dont certains resteront sans nul doute présents dans vos esprits.

Mon petit coup de cœur est pour Chiara, à qui ira le vôtre ?

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• Fragile des bronches de Bertrand Blier

« Je comprends que tout ce qui me viendra de bon dans la vie sera apporté par ma mère, mais aussi peut-être par mon père, dont je vois les gros yeux effarés porter difficilement ses valises de tendresse. »

« Ça tire vers l’autobiographie, prudemment » dit Bertrand Blier de son dernier roman, Fragile des bronches.

Derrière les noms d’emprunt, on reconnaît toutefois sans difficulté Bernard Blier, le père et Bertrand, son fils. On entre dans l’intimité d’une famille peu ordinaire…Le célèbre acteur est sur les routes et invite ses partenaires de comédie dans ses chambres d’hôtel, sa femme déprime et se console avec un brave représentant de machines à laver. Tout cela se déroule sous les yeux du fils, occupé lui-même à découvrir les choses de la vie.

Le cinéaste écrit de petites scènes drôles et tendres à la fois, certains dialogues évoquant le théâtre de l’absurde quand d’autres nous plongent dans un univers à la Audiard. La dégustation de la Dégraissée dans la cuisine familiale n’est pas sans rappeler une scène mythique des Tontons Flingueurs. Nous assistons à la genèse d’un grand réalisateur qui vit son enfance comme un drame dont ses parents sont les protagonistes.

Une auto-fiction à déguster comme on visionne un vieux film en noir et blanc aux dialogues truculents.

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Je vous souhaite une belle saison, de belles rencontres et de beaux moments en compagnie de tous ces êtres de papier qui ne demandent qu’à vous faire voyager entre les pages de vos romans d’été.

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Frédérique Vanandrewelt - Gradisnik

Professeure de français et passionnée par la littérature, Frédérique dévore les livres, et nous en parle… il y’en a toujours pour tous les goûts, tous les styles, et tous les niveaux.

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