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PAROLE D’ENTREPRENEUR : LA PAROLE À… Anouchka Sooriamoorthy-Desvaux de Marigny

 PAROLE D’ENTREPRENEUR : LA PAROLE À… Anouchka Sooriamoorthy-Desvaux de Marigny

Première boite ?

C’est la troisième initiative que je lance. La première, en 2009, fut la création d’un quotidien francophone en ligne qui s’appelait L’Oriental ; j’ai mis un terme à cette aventure en 2011 pour me lancer dans une autre tout aussi exigeante : la maternité. En 2017, j’ai concrétisé un rêve d’adolescente en créant Goni, une marque de vêtements et d’accessoires inspirés de mon île Maurice natale, et dont les produits s’adressent en priorité aux hôtels sur place.
Et cette année j’ai lancé In the chaos-world, une boîte de… philosophie ! Mais en y réfléchissant davantage, je crois que ma première aventure entrepreneuriale fut ma thèse de doctorat.
Se lancer dans une thèse, c’est avoir une idée que l’on poursuit pendant des années avec exaltation et parfois découragement ; c’est aussi une aventure extrêmement solitaire qui exige tant de la détermination qu’un sens quasi militaire de l’organisation. A l’époque, et je ne l’avais pas analysé sous cet angle, je vivais déjà le quotidien d’un entrepreneur. 

Depuis combien de temps à Dubai ?

Je me suis installée à Dubaï en septembre 2007. Avant cela, je vivais à Paris où j’ai effectué mes études supérieures et où j’ai commencé à travailler. Je suis arrivée à Paris à l’âge de dix-huit ans, après avoir obtenu mon baccalauréat au lycée français de l’île Maurice. 

Présentez-nous votre business en quelques lignes… 

J’anime des interventions philosophiques en entreprise. Je dis souvent que la philosophie permet d’effectuer un pas de côté dans un quotidien dont le rythme et le poids empêchent toute mise à distance.
Toutes mes interventions sont sur-mesure : après un premier échange, j’identifie les problématiques de l’entreprise et je construis une intervention qui viendra rencontrer le vécu des collaborateurs. En ce début d’année 2022, je lance « Fridays for philosophy » : faire de la fin de la semaine travaillée qui est désormais le vendredi aux EAU un moment opportun pour apporter la philosophie au sein des entreprises. 

Est-ce que vous avez toujours rêvé d’être entrepreneur ?

Non. J’aime l’idée de faire partie d’une famille professionnelle. A Paris, j’ai travaillé pour Le Monde et ensuite pour Gallimard ; ce sont de belles entreprises avec des valeurs auxquelles je pouvais m’identifier. C’est le même lien que je détiens avec le Lycée Français International Georges Pompidou où j’enseigne depuis quatorze ans.
Mais je suis aussi extrêmement attachée au concept de liberté, non pas au sens superficiel de faire ce que l’on veut quand on veut ; la liberté, c’est définir le sens de ses actions et non pas suivre celui qui me serait imposé. C’est ce que je recherche et que j’ai trouvé dans le parcours de l’entrepreneur.

Qu’est-ce qui a provoqué le déclic pour sauter le pas ?

Un coup de téléphone. Cela faisait des années que j’avais ce projet d’apporter la philosophie en entreprise, mais à chaque fois je trouvais des raisons valables de ne pas me lancer : les responsabilités familiales, le manque de temps. En réalité, je crois que je craignais de sortir du confort de ce que je maîtrisais : la salle de classe est une scène où je suis parfaitement à l’aise. Il a fallu apprendre à échanger avec un public nouveau, à susciter l’enthousiasme différemment. Une entreprise m’a appelée pour animer une intervention, j’ai dit oui, je me suis lancée, et cette première expérience réussie m’a convaincue de la pertinence de ma démarche ! 

Pourquoi avoir choisi Dubai pour entreprendre (ou pour exporter votre concept) ?

J’ai choisi Dubaï parce que c’est le lieu où je vis. Aurais-je lancé ce projet, et les autres, si j’avais vécu ailleurs ? Je ne saurai répondre à cette question mais, ce qui est certain, c’est que je suis portée et nourrie par l’énergie des grandes villes dont Dubaï est la parfaite illustration. 

Quels sont les challenges/difficultés/facilités pour entreprendre à Dubai ?

Je disais précédemment que Dubaï, comme d’autres grandes villes, a ce dynamisme créateur. Cela a comme conséquence que les gens sont souvent enthousiastes à l’idée de nouveaux projets.
La difficulté est de transformer leur intérêt en lien professionnel véritable : dans une ville où tout le monde court en permanence de sollicitations en sollicitations, il n’est pas évident de créer des échanges constructifs dans la durée.  

Quelle est votre source de motivation chaque jour ?

La philosophie ! Depuis que j’ai fait sa rencontre à l’âge de dix-huit ans, je ne m’en suis jamais séparée. Je suis convaincue qu’il est beaucoup moins difficile d’affronter la vie avec des outils philosophiques que d’y aller à mains nues. C’est pour moi une évidence : la philosophie aide dans des situations pratiques de la vie.
S’il n’y a pas de solutions (si tant est que la vie soit un problème !), il y a du moins des pistes et une méthode qui sont d’une grande utilité. Socrate, en ce sens, était le premier coach de l’histoire ! 

Avec le recul, que referiez-vous différemment ?

Le philosophe Friedrich Nietzsche élabore le concept d’éternel retour : vouloir revivre sa vie exactement telle qu’elle s’est produite, avec les mêmes plaisirs et les mêmes douleurs. Celui qui accepterait cela, c’est celui qui aime véritablement la vie. C’est une idée que j’ai faite mienne depuis un certain temps, je ne referrai donc rien différemment, non pas parce que le cheminement fut parfait, mais parce que c’est le mien et que je le chéris avec toutes ses imperfections.

Avez-vous bénéficié d’aides pour vous lancer ? 

Être entrepreneur, c’est être seule entourée des autres : mon époux (qui est un entrepreneur compulsif !), mon fils (du haut de ses dix ans) sont mes débatteurs, mes auditeurs, mes conseillers ; il y a aussi les amis qui m’ont encouragée et qui m’ont fait bénéficier de leurs réseaux. Les acteurs de la communauté française ont été d’un véritable soutien, je pense notamment à mes collaborations avec la CCI France UAE et avec l’Alliance française.

Si vous aviez deux conseils à donner au futur entrepreneur qui vous lit ?

Je pense que conseiller est une tâche impossible : postuler que son expérience personnelle pourrait servir d’éclairage ou de schéma aux autres ne me semble pas être très réaliste. Cependant, je peux essayer d’exprimer un conseil à partir d’une observation : je vois souvent des individus qui élaborent des projets en partant de ce qui, selon eux, manque à la société. Ils cherchent en quelque sorte à trouver le filon inexploité.
D’une part, ce filon, un peu comme dans l’exemple du chercheur d’or malheureux, pourrait ne jamais être trouvé ; d’autre part, si surgit l’idée révolutionnaire, il faut être certain de détenir les compétences pour la mener à bien. Ne faudrait-il pas plutôt effectuer la réflexion inverse : partir de ce que l’on sait faire, mieux ou différemment des autres, pour ensuite élaborer un projet ? 

Et deux bonnes adresses ?

Cinema Akil à Al Serkal, c’est mon lieu préféré de Dubaï : les canapés désuets en velours grenat et doré, la sélection toujours de qualité des films, le thé à la cardamone et le paratha aux œufs de Project Chaiwala que l’on déguste après le film !
Ma deuxième adresse est un lieu temporaire : je suis fan de l’expo universelle qui est selon moi une réussite architecturale. 

Comment conciliez-vous vie de parents et d’entrepreneur ?

Dans nos sociétés où l’injonction professionnelle est aussi importante que l’obligation familiale, je ne sais si une conciliation équilibrée est possible. Partout autour de moi, j’entends des individus se plaindre de cette double culpabilité (ne pas être un employé suffisamment performant, devenir un mauvais parent) et je n’y échappe pas.
Mais je crois que je suis une meilleure mère en travaillant (probablement trop !), en m’épanouissant intellectuellement, en montrant à mon fils qu’il aura la chance, s’il s’en donne les moyens (et combien sont-ils, les privilégiés à pouvoir affirmer cela ?) de faire plus tard ce qu’il aimera.

Des projets futurs ?

J’ai la chance d’avoir un métier, enseignante de philosophie, que j’adore ; j’exerce en parallèle ce deuxième métier, celui de conférencière en entreprise, qui me passionne. J’aimerai essayer de savourer ce bonheur qu’est le mien sans être contaminée par la maladie de l’époque qu’est l’hystérie du futur. Carpe diem, saisir l’instant présent, écrivait Epicure ! 

PETIT PORTRAIT INDISCRET

Plutôt matinal ou oiseau de nuit ? Matinale par obligation professionnelle, oiseau de nuit par goût immodéré de la fête.
Plutôt café-croissant ou pti-dej healthy ? Le cœur répond le premier, la raison le deuxième (heureusement que le cœur l’emporte parfois !)
Plutôt sport extrême ou méditation ? Un sport qui permet la réflexion : courir ou nager. 
Plutôt robe-sandales ou tailleur-talons ? Des vêtements qui accompagnent le mouvement et refusent le figement, à l’image de la pensée !  
Plutôt week-end cocooning ou fiesta ? Après la fête, le cocooning. 
Plutôt cigale ou fourmi ? 80% fourmi, 20 % cigale.

LE MOT DE LA FIN :

A quoi sert la philosophie ? A essayer d’atteindre le bonheur. 

Contacts :
Site internet : Inthechaosworld.com
Instagram : @danslechaosmonde

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